Le gouvernement de Viktor Orbán a franchi une nouvelle étape vers l’établissement d’un régime illibéral avec l’approbation par le Parlement hongrois — contrôlé par le Fidesz, la formation du Premier ministre — d’une loi qui restreint les droits des enseignants. Le président a désormais ciblé une institution fondamentale dans une démocratie comme l’éducation, dont les professionnels se sont distingués pendant les 17 années au pouvoir d’Orbán, dont 13 années consécutives, pour être l’un des secteurs les plus critiques à l’égard de sa gestion.
La législation approuvée prive les enseignants de leur statut de fonctionnaires, limite leur autonomie, ouvre la porte à des changements arbitraires d’affectation et augmente la charge de travail déjà excessive. De son côté, le gouvernement ultra-conservateur défend la mesure comme une « revalorisation sociale et salariale » du personnel enseignant. Mais les enseignants hongrois protestent depuis des années, qui se sont multipliés ces derniers mois de manière massive et récurrente, c’est pourquoi ils ont qualifié la nouvelle norme de « loi de la revanche » et assurent que le nouveau texte ne remplit en rien l’objectif proclamé par l’exécutif de Budapest. Un exemple suffit : les augmentations de salaire sont liées à la réception des fonds européens qui, pour la plupart, restent bloqués par Bruxelles justement à cause des violations de l’Etat de droit commises par le gouvernement Orbán. Sur les 38 pays de l’OCDE, la Hongrie est le deuxième enseignant le moins bien payé.
Avec cette loi, Orbán aggrave son éloignement de l’Union européenne, avec laquelle il entretient une confrontation ouverte cristallisée dans la suspension des fonds par Bruxelles, et le tout à l’horizon de Budapest assumant la présidence tournante de l’Union, que l’Espagne vient de commencer, au second semestre de l’année prochaine. L’éventail des désaccords est large et touche aux valeurs fondatrices de l’Union. Dans une décision inédite, le Parlement européen a exigé en mai dernier que le Conseil mette son veto à la présidence hongroise, une décision qualifiée par le gouvernement Orbán de « chasse aux sorcières » motivée par le « kidnapping » du Parlement européen par « la gauche ». Mais, rhétorique ultranationaliste mise à part, c’est le même Exécutif hongrois qui, depuis des années, ouvre une dangereuse voie illibérale qui passe par l’établissement de lois anti-LGTBI injustifiables — contre lesquelles 15 États membres ont porté plainte — ou des ingérences dans le pouvoir judiciaire devant lesquelles il a même été envisagé de priver la Hongrie du droit de vote au Conseil de l’Union.
Compte tenu de l’attitude d’Orbán, l’Union européenne s’est parfaitement adaptée aux procédures, comment pourrait-il en être autrement, mais elle a également été extrêmement patiente. Orbán est devenu un exemple pour d’autres projets illibéraux dans le reste du continent, y compris l’Espagne, où il a un allié en Vox. L’Europe doit montrer toute la force de ses principes fondateurs pour défendre à la fois les citoyens hongrois et le reste des Européens.