En Espagne, depuis au moins deux décennies, nous sommes confrontés à un creusement du fossé des générations. Notre pays connaît un grave problème structurel d’emploi des jeunes qui se traduit par un taux de chômage trop élevé par rapport aux pays voisins, des emplois temporaires inacceptables, des bas salaires et des emplois peu qualifiés. Cette instabilité rend difficile, voire impossible, pour les jeunes générations d’accéder à un logement, de construire un projet de vie et de faire face à tout imprévu. Tout cela a affecté les jeunes individuellement et collectivement, augmentant les problèmes de santé mentale et générant de la désaffection, de la déception et, à plusieurs reprises, de la colère.
Le malaise des jeunes face à leurs conditions de vie, matérialisé à maintes reprises par la précarité de l’emploi, est à l’ordre du jour. Nous l’avons vécu en 2008 avec la crise financière, qui a poussé de nombreux jeunes à émigrer, avec la perte conséquente de talents pour notre pays. Nous l’avons augmenté pendant une pandémie, au cours de laquelle les jeunes ont été rendus invisibles par des priorités plus urgentes. Et nous continuons à le vivre dans un contexte de guerre, de crise géopolitique et de changement de cycle économique qui remplit encore une fois l’avenir d’incertitudes. En bref, une génération qui a grandi de fait historique en fait historique, et qui en ce moment demande de l’attention.
Bien que l’année dernière nous ayons vu que les réformes législatives ont permis à ce groupe d’être l’un des principaux protagonistes de la croissance de l’emploi ou de l’amélioration des conditions telles que l’emploi temporaire, les problèmes continuent d’être beaucoup plus profonds. Les moins de 30 ans sont ceux qui ont le plus souffert de la dégradation de leurs conditions de travail car ce sont eux qui ont les rapports les plus précaires à leur emploi et ceux qui connaissent un parcours du combattant basé sur l’enchaînement des crises. Ils sont un exemple, même avec les améliorations, qu’obtenir un emploi ne garantit pas d’avoir accès à un logement, de penser à fonder une famille sous quelque forme que ce soit, ou simplement de se former pour acquérir les compétences requises par les nouveaux emplois qui impliquent déjà les défis environnementaux , numérique ou démographique. À titre d’exemple, la numérisation est un grand défi en Espagne, puisque 35 % de tous les emplois sont associés à un risque élevé d’automatisation. Par conséquent, l’éducation aux compétences, connaissances et compétences numériques est essentielle pour atteindre l’ensemble de la population jeune.
Les conséquences de ce manque d’attention sont particulièrement graves pour les jeunes les plus vulnérables. Le taux de risque de pauvreté et d’exclusion sociale (AROPE), qui avant la crise de 2008 était plus faible chez les jeunes qu’en population générale, a cependant doublé en 2015, progressant beaucoup plus intensément chez les hommes et les jeunes qu’en population générale. Sur la base des données 2021, le taux AROPE chez les 16-19 ans est de 33 % contre 27 % pour la population générale. Ce tableau est inacceptable pour une société qui espère maintenir, voire accroître, sa prospérité à long terme.
Pour cette raison, nous ne pouvons pas nous permettre de revenir en arrière dans l’agenda des droits des jeunes. L’absence de politiques spécifiques, d’un système de protection adapté à leurs besoins et de mécanismes d’encouragement, de soins et d’orientation, a conduit de nombreuses jeunes générations à se sentir exclues ou marginalisées dans la vie sociale, économique et politique du pays. En fin de compte, ils sentent à quel point le système leur a fait défaut.
Sans aucun doute, le fossé générationnel dépasse les niveaux de revenus qu’un travail décent peut procurer, mais atteint déjà la possibilité d’avoir des attentes et un projet de vie, comme les générations précédentes.
Il est maintenant temps de parler des types d’emplois recherchés par les nouvelles générations et, avec eux, du type d’avenir qu’elles souhaitent. L’émancipation des jeunes, qui implique l’accès à un logement adéquat et abordable, ainsi qu’à des services de qualité répondant aux besoins fondamentaux des jeunes, devient non seulement un droit, mais est en même temps l’élément qui déterminera ce que sera ce pays et cette société dans les 50 prochaines années. Et au sein de ce groupe de jeunes, nous devons accorder une attention particulière à ceux qui viennent de contextes plus vulnérables, qui ont été confrontés à des conditions plus dures, car ce sont eux qui risquent le plus d’être laissés pour compte. Par conséquent, dans cette campagne électorale et en vue du 23-J, mettre la jeunesse au centre du débat devrait être fondamental pour tous les partis politiques.
Retrouver la confiance des jeunes générations est une tâche qui nous concerne tous, et un outil indispensable pour y parvenir sont des politiques publiques de qualité. Ce serait une erreur de penser qu’avec le temps, la situation des jeunes s’améliorera automatiquement, en raison de l’effet d’entraînement provoqué par un cycle économique expansif. Nous avons besoin de plus de politiques de jeunesse qui se concentrent sur l’offre d’opportunités de formation et d’orientation qui améliorent la qualité et garantissent l’emploi, et celles qui promeuvent les jeunes qui souhaitent lancer leurs propres projets entrepreneuriaux.
Notre jeunesse est pleine de talent, de créativité et d’énergie. Si nous leur fournissons les outils et les opportunités nécessaires, nous pouvons assister à une véritable transformation de notre société. Le temps est venu d’inspirer et d’être inspiré, de construire un environnement plein d’opportunités et d’ouvrir les portes à une nouvelle génération. L’avenir en dépend.