Le premier long métrage du Nicaraguayen William Alexander González Guevara, avec lequel il a remporté le prix Antonio Carvajal de la jeune poésie, recycle de son certificat de baptême le terme avec lequel Eduardo Galeano nommait les démunis, les dépossédés ou les « parias de la terre ».
Loin de se révolter contre cette condition subalterne, l’auteur la brandit comme un signe identitaire provocateur dans un livre qui se lit à la fois comme la chronique d’un immigré de la périphérie madrilène et comme celle qui reflète le passage de l’adolescence à la maturité précoce. .
Ainsi, la nation dont est issu l’auteur est brouillée dans la mémoire (« ma guérilla courageuse et thermale ») ou subsumée dans les enseignements de Rubén Darío, auquel on fait appel comme figure tutélaire dans diverses compositions. Pourtant, personne ne s’attend à trouver ici des princesses mélancoliques, des jeunes gens considérés comme des trésors divins ou des cygnes interrogateurs. Les nouvelles « chansons de vie et d’espoir » chantées par González Guevara nous parlent davantage de la lutte pour la subsistance, du nomadisme forcé et de la marginalité dans une patrie adoptive qui devient souvent une belle-mère.
La première section du livre fonctionne comme un hommage aux professeurs de l’école Lope de Vega, dans une évocation de l’enfance dans laquelle convergent la découverte de la lecture et la demande d’éducation gratuite. Cependant, le cœur du volume se situe dans les sections suivantes ( et ), à travers lesquelles défilent un melting-pot de nationalités et un échantillon de métiers méconnus et mal rémunérés. Employés de maison, menas, membres de gangs, livreurs de nourriture ou vendeurs de la couverture supérieure composent un kaléidoscope humain palpitant qui aboutit au même constat : « La vie nous dépasse en émigrant ».
Les deux dernières sections, plus hétérogènes dans leurs formants discursifs, passent en revue d’autres absences (l’adieu amoureux, l’orphelinat, le silence de Dieu) et défendent la valeur de la parole comme seul antidote qui « évite de mourir à distance ». La principale réussite de consiste à éviter à la fois le document prosaïque et la déchirure pathétique pour livrer un témoignage lyrique plein d’avenir.
Auteur: William Alexander González Guevara.
Éditorial: Hypérion, 2022.
Format: couverture souple (84 pages, 11,54 euros).
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