Corine Pelluchon, la penseuse des plus vulnérables

Corine Pelluchon à l’Institut français dans une image de 2022.JUAN BARBOSA

Corine Pelluchon (Barbezieux-Saint-Hilaire, 1967) est philosophe, bioéthicienne et défenseure des animaux. Il a suivi une ligne cohérente dans sa pensée, se plaçant toujours aux côtés des plus vulnérables, contre la domination qui prévaut dans le monde. «Je suis très sensible au mal qui s’exerce sur les corps, et j’y réponds par mes pensées», raconte Pelluchon elle-même au téléphone. Les questions qui l’intéressent sont, outre la vulnérabilité, le féminisme, le spécisme (discipline dans laquelle elle est une référence) et le rapport à notre propre finitude, tous, affirme-t-elle, sont les signes d’un âge futur qu’elle estime être sur le point de naître, celui qui accompagne et annonce par son œuvre.

Fille d’agriculteurs, c’était une fille amoureuse de poésie et de langues qui ressentit très tôt une attirance pour la philosophie. Depuis l’âge de 15 ans, elle souhaitait en savoir plus sur cette discipline dont la rigueur et la profondeur agissait pour elle comme une sorte d’aimant. « J’ai toujours été un pisteur ; « Je ne peux m’empêcher d’aller toujours à la racine des choses. » Ses parents ont compris qu’ils devaient soutenir l’amour de leur fille pour les livres, même si, au début de ses études, le programme, « trop démodé et banal », l’a déçue. Mais il n’a pas abandonné : il a suivi son propre chemin.

Pelluchon estime qu’il faut placer la relation à notre environnement au centre du débat politique. Dans (Reservoir Books, 2018), a soutenu que les droits des animaux devaient être soumis au Parlement une fois pour toutes. Dans (Herder, récemment publié) montre comment aplanir nos difficultés pour changer un style de vie typique d’un modèle de développement qui nous mène à la destruction. Et la philosophe française désigne l’un de ses livres non publiés en espagnol comme celui qui résume le mieux sa pensée : (des éditions du Seuil ; Les lumières à l’ère du vivant), dans lequel il explique que le monde est divisé entre ceux qui vivent dans la domination (exploitation par le travail, violences de genre, animaux dans les macro-fermes…) et les défenseurs de la considération (animalistes, féministes, partisans de la coexistence…), qui soutiennent, affirme-t-il, « les lumières ». Son intention est d’accompagner ces derniers, de structurer leur pensée avec leur travail, en développant une sorte de « révolution anthropologique ».

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Pelluchon, qui se reconnaît libérale et non ennemie du libre marché, en plus d’être sensible à la douleur, est aussi sensible à la beauté. Elle essaie de s’entourer de jolies choses et il n’est pas rare de la voir habillée de tissus clairs ou pleine de fleurs. Il lui reste encore à construire un réseau avec d’autres philosophes et sociologues européens avec lesquels partager ses travaux et enquêter sur certaines questions. Il a essayé et échoué, mais il persiste. « Bien sûr, dit-il, les gens doivent avoir moins d’ego. »