José Manuel Cabrera (San Cristóbal de la Laguna, Tenerife, 49 ans) est, depuis quelques jours, président de la principale association des inspecteurs pédagogiques en Espagne, Ajouter. Les fonctions officielles d’un inspecteur pédagogique, figure assez méconnue du monde de l’éducation, sont d’évaluer, d’encadrer et de conseiller les enseignants, les équipes dirigeantes, les élèves et les familles. Et en ces temps, ajoute Cabrera, promouvant également la réforme de l’éducation. « Ces dernières années, de nombreuses lois ont été approuvées, mais nous devons encore transformer l’enseignement », déclare-t-il devant une immense vitrine du Palau de les Arts de Valence, où se tient le congrès qui vient de l’élire.
Interroger. De nombreux enseignants se demandent comment mettre en pratique la nouvelle manière d’enseigner prévue par la loi.
Réponse. Les changements sont toujours compliqués et prennent du temps. Et dans l’éducation, ils nécessitent encore plus de temps. Le rôle de l’inspection devrait être d’accompagner et de conseiller afin qu’elles soient faites de la meilleure façon. Nous ne voulons pas seulement un changement formel, mais une véritable transformation vers un enseignement par compétences, ce que l’Europe nous demande et ce que nous comprenons être adapté à l’époque actuelle.
Q De nombreux enseignants ont du mal à donner cette tournure à des méthodologies plus actives, dans lesquelles les étudiants ont un plus grand rôle, et en même temps à compléter certains programmes qui, surtout dans certaines communautés, sont encore très longs.
R Les enseignants doivent garder à l’esprit les principaux objectifs de la loi. L’une consiste à réduire le programme d’études pour aller aux connaissances de base, à ce qui est vraiment important, et une autre est le profil de sortie [los grandes objetivos que se pretende que alcancen los estudiantes al acabar la educación obligatoria]. Étant clair où nous devons aller de l’avant, il sera beaucoup plus facile d’y arriver.
Q L’Espagne est à la traîne en matière d’apprentissage basé sur les compétences, contrairement à de nombreux pays voisins. A quoi attribuez-vous la résistance ?
R Nous avons tous une histoire. Souvent, la faculté enseigne comme elle a été enseignée. Mais la société a changé, et nous devons aussi changer la façon dont nous éduquons nos jeunes. On ne peut pas se baser sur une simple transmission de contenu, c’est comme ça qu’on a appris. Il faut leur enseigner des capacités, des compétences, apprendre à apprendre, pour qu’ils sachent comment continuer à apprendre dans le futur, car la société va continuer à changer et les enfants d’aujourd’hui devront savoir s’adapter.
Q La majorité des enseignants estiment qu’ils n’ont pas été formés au changement. Et les inspecteurs ?
R Il serait souhaitable qu’il y ait plus de formation, ce qui devra être fait pour mieux avancer vers les objectifs, et à plus long terme pour rendre la loi efficace. Mais parfois, il y a des problèmes urgents à mettre en pratique. L’enseignement et l’apprentissage basés sur les compétences ont déjà été mis en place en 2006 par le Conseil de l’Europe, et je comprends qu’il y ait une ruée vers sa mise en place.
Monique Torres
Q Les communautés autonomes développent la loi sur l’éducation de manière très différente dans des domaines tels que le contenu, la méthodologie, les règles d’évaluation et de réussite du cours, le degré d’autonomie des centres… Cela vous semble-t-il un problème, car divers des voix avertissent ?
R La loi établit quel pourcentage du programme correspond à l’ensemble du ministère de l’Éducation et à celui des communautés autonomes. Je comprends que les communautés prennent des décisions différentes, tout comme les centres éducatifs, pour s’adapter à leur contexte social. Il doit y avoir une autonomie pour prendre les meilleures décisions, et celles-ci doivent être évaluées.
Q Les résultats de l’évaluation internationale Pirls, centrée sur l’enseignement primaire, et plus tard ceux de Pisa, sur l’enseignement secondaire, seront annoncés prochainement. Vous attendez-vous à ce qu’ils reflètent l’impact de la pandémie ?
R Bien sûr, mais pas seulement en Espagne. La pandémie a été un problème auquel nous n’étions pas préparés et que nous avons abordé de la meilleure façon, avec un effort gigantesque des centres. Ces tests, en revanche, ne servent pas tant à indiquer le niveau actuel de nos élèves qu’à voir des tendances, si nous travaillons dans la bonne direction. Et il faut garder à l’esprit qu’il s’agit d’évaluations des compétences, que nous n’appliquons toujours pas en général dans nos centres.
Q Quel est le plus gros problème de l’éducation espagnole ?
R Peut-être l’équité, ce qui n’est pas facile à atteindre. Cela nécessite beaucoup de ressources. Que les centres en disposent et qu’il y ait une répartition équitable des élèves pour éviter la ségrégation.
Q L’éducation reçoit désormais de nombreuses ressources, par exemple pour la numérisation.
R Nous avons besoin d’enseignants formés et formés au numérique, car nous avons vu avec la pandémie que nous ne savons pas ce qui nous attend dans le futur, et un effort est fait dans ce sens. Il faut augmenter les budgets de l’éducation, doter les centres de ressources pour qu’ils puissent exercer l’autonomie que la loi leur donne, évaluer leur utilisation, et leur fournir d’autres types de professionnels qui aident aussi dans le domaine social, psychopédagogique et assistent aux besoins individuels de chaque élève.
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